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Être un coureur confiné et mélangé

Pour les coureurs, être confinés à l’intérieur, et particulièrement pour les coureurs de trails, c’est pas mal perdre l’ensemble de ses repères. Nous nous sommes accrochés à l’hiver, nous avons affronté la course dans le froid et la gadoue, tout cela en rêvant à nos premières sorties dans les sentiers, mais il semble bien que nous allions devoir attendre un peu. Notre plan de match s’est pas mal effondré. Notre saison de trail était planifiée, mais, au fur et à mesure que les courses s’annulent, notre optimisme est disparu.

En attendant que le tout se calme un peu, que peut-on faire? La réponse est confuse : courir, un peu, beaucoup, pas du tout? Est-ce que courir, c’est être un confiné qui gère bien son isolement? Ou, au contraire, c’est être un vecteur de contamination ambulant? Malgré le fait que nous recevions plusieurs messages contradictoires, quatre prédominent.

1) Il ne faut pas se blesser

Les hôpitaux sont débordés et possiblement infestés de virus. Il faut s’en tenir loin et éviter de s’y retrouver. Au cours de mes dix dernières années de course de trail, je ne me suis jamais retrouvé à l’hôpital à la suite d’une chute; mais bon, ok, je vais faire attention, je ne prendrai pas de risques.

2) Il faut éviter les sentiers en forêt

Les parcs provinciaux sont fermés; en Outaouais, notre terrain de jeu local, le parc de la Gatineau l’est aussi. Il semble bien que courir dans le bois soit un acte de désobéissance civile : bon, ok, je n’irai plus dans les bois.

3) Il faut éviter les efforts intenses

L’effort intense peut diminuer l’efficacité de notre système immunitaire, et lors de cet effort, nous risquons de contaminer davantage les autres; bon, ok, je vais courir mollo, mollo, pas longtemps, juste un petit peu.

4) Il faut respecter la distanciation sociale

Toute course est devenue une course à obstacles. Avant, croiser un autre coureur était un moment d’échange; maintenant, c’est une source de stress. Est-ce que j’ai les deux mètres requis ? Est-ce que c’est assez ? Comme je cours, cela ne serait pas mieux d’avoir cinq mètres ? Oui, mais à cinq mètres, je vais me retrouver dans le bois… Et c’est interdit. Si ce n’était que des coureurs, mais soudainement, les trottoirs sont devenus envahis par des marcheurs qui tournent en rond en attendant la fin du confinement. À chaque piéton ou cycliste que tu croises, le stress monte… Tu crains d’être invectivé par quelqu’un qui te considère être un danger public. Bon, ok, je vais courir seulement où il y a à peu près personnes.

Les  doutes

Finalement, on se retrouve fort confus face à ces nombreux dilemmes. La communauté de coureurs n’existe plus vraiment autrement que par Stava…, et ce n’est pas fantastique comme mode de socialisation. On est habitué à jouer dehors avec des amis… Et l’on se retrouve confiné, à ronger notre frein, alors que nous avons enfin du temps pour courir. Mais bon, le printemps se pointe enfin, la santé est super, les proches vont bien et comme tout le monde, on s’accroche… Espérons que le leitmotiv répété ad nauseam ces temps-ci, soit bien vrai, ça va bien aller. Ça devrait.