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Souvenirs de mon premier ultra

Il est déjà le temps de dire au revoir à la saison de course en sentier au travers des paysages d’été. Plusieurs grands exploits personnels ont été réalisés sur des distances de toutes sortes. Et j’ai vu des ultratrails plus qu’impressionnants. Moi qui désire en faire un 2e, ma motivation a grimpé en flèche. Étant en guérison de blessures depuis ce printemps, il m’est venu le goût de raconter et de me remémorer ce jour où j’ai réalisé mon 1er ultra.

Un peu de rétrospection

Quand j’ai découvert la course en sentier, courir des ultratraisl était pour moi très farfelu et d’une immensité inatteignable. Je me disais que c’était démesuré que de parcourir des dizaines et des dizaines de kilomètres jusqu’à en voir deux fois le lever du soleil. Eh bien! ma perspective a bien changé quand j’ai plongé graduellement dans l’univers du trail. Dès ma 1ère année de course en sentier, je passe du 18 au 30 km. Le défi de se dépasser devient grandissant, tout en ayant le bonheur de découvrir d’immenses territoires sauvages.

Et puis la question qui surgissait… de quoi suis-je capable? Ça, c’est il y a 2 ans. Je rêvais de faire l’UTHC 80 km. Je rêvais de réussir une longue course où on est longtemps dans les bois. Des amis à moi avaient déjà participé à l’UTHC 125 km et à bien d’autres ultratrails à travers le Québec. Étant aventureuse de nature, leurs exploits sportifs m’inspiraient à découvrir cet univers qu’est l’ultratrail. C’est d’ailleurs cet automne-là que je m’inscris à mon 1er grand défi pour l’année suivante, l’UTHC80, encouragée par cette gang de crinqués.

On a tous un modèle dans le sport qui nous inspire particulièrement et qui nous motive à se fixer et à atteindre nos objectifs personnels. Pour ma part, c’est une fille d’allure réservée, bien connue du trail, qui détient une force intérieure et qui me fait grandement penser à moi dans le trailrunning. C’est Élisabeth. Certains de mes amis, qui ne la connaissent pas, me demandent qui est-elle ? Bien c’est la sœur à Jeff Cauchon voyons !

Janvier 2018 

J’ai pris l’hiver pour guérir soigneusement un syndrome de la bandelette. Plus que prête, j’amorce le retour progressif à l’entraînement. J’ai le désir de m’amuser et de profiter pleinement de cette expérience de trail. De réussir ma course du début jusqu’à la fin du mieux que je le peux. D’être bien préparée mentalement et physiquement pour ce grand jour. Et pour le chrono? Normalement, je n’aime pas me fixer ce genre d’objectif. J’aime courir au feeling de ma respiration et de mon niveau d’énergie. Mais, pour l’UTHC80, la compétitive en moi avait ce petit désir de réaliser un bon temps. Mais, comment j’allais faire pour l’atteindre?

Ayant déjà observé quelques réalisations de cette bonne coureuse de Québec, j’étais intriguée et enjouée de constater ses exploits mais également ses chronos. Je m’étais rendue compte, en les analysant, que j’avais déjà réussi à courir quelques temps similaires au sien. En plus d’être un modèle féminin pour mon début dans le trailrunning, je suis toute énervée de pouvoir peut-être, qui sait, réaliser un chrono similaire à ce qu’elle a déjà réussi. Un potentiel d’objectif de temps surgit donc devant moi. Je rêve alors de courir entre les 10 h et 10 h 30.

L’été avance et j’ai l’opportunité de m’entraîner à quelques reprises avec un bon ami à moi pour mes longues sorties. Je lui confis mes désirs de réaliser un temps de près de 10 h. À première vue, il trouve ça plutôt rapide.

Le Jour J 

À 07 h 00, 8 septembre 2018, je prends le départ de cette belle et 1ère aventure d’ultratrail en compagnie de mon ami Stéphan, cet ami avec qui j’ai partagé plusieurs km de sentier durant l’été.

Un peu stressée, le départ est assez rapide. Je profite des premières foulées avec mes amis VO2 du 65 et du 80 km et demeure conservatrice sur cette seule section asphaltée. Les km dans les bois passent si vite, et tout va si bien tant dans la gestion de l’énergie et de la vitesse que dans la gestion de la nourriture. Je bavarde tantôt avec mon ami Stéphan, tantôt avec de nouvelles connaissances. L’air est frais et la verdure est resplendissante !

Malgré que je reste concentrée sur la gestion de ma course, je profite du moment présent et de la chance que j’ai de parcourir les sentiers dans ces parties sauvages et reculées de la ville. J’ai également cette chance de partager mon 1er ultratrail avec un grand ami. Étant MA course, c’est moi qui gère le pace. Il est là pour s’amuser, m’accompagner dans mon 1er ultratrail mais aussi pour se préparer au Bromont Ultra 160 qui a lieu le mois suivant et pour qui je serai sa paceuse des derniers 40 km. On jase de tout et de rien, on découvre la trail avec plaisir.

Déjà, au 2e ravito, mon amie Suzanne, qui y  est en tant que bénévole, m’annonce que je suis 3e femme. Un petit moment d’excitation et je me calme. C’est tout de même enivrant, il faut se l’avouer! Mais il faut garder le focus. Plus la course avance, plus mon ami Stéphan commence à croire à mon objectif de temps. Il m’encourage et me dit: « T’es capable! »

De ravito en ravito, le renforcement positif persiste. C’est quand j’arrive au pied du Mont-Grand-Fond que je réalise que la plus grosse partie est maintenant derrière moi. Si heureuse d’arrivée au ravito, et dirais-je très lunatique à ce moment, je ne vois pas la fourche pour m’y rendre et continue à courir vers l’arche d’arrivée, tout en tentant de trouver les indications cachées par quelques « supporters ». Heureusement, je réussis à entendre les cris de mes amis et j’évite de traverser la ligne d’arrivée. Oufff !!! Quelle gaffe j’aurais faite!

Photo: Audrey Tremblay

Il paraît que nous avons l’air en top shape après 65 km.  Pour ma part, je me sens si bien. Si énergique et pleinement motivée. Ceci représentait en fait mon 1er grand objectif de la course. Je n’en reviens juste pas puisque, jusqu’à maintenant, ma course s’est déroulée à la perfection.

« Enfin ! Le Mont Grand-Fond et c’est fini! Plus que 15 km » ! Je vous dirais que la présence de Stéphan a été agréable tout au long du parcours car j’adore partager les trails en sa compagnie. Mais, elle m’a surtout aidée à ne pas ralentir durant cette montée abrupte. Mes mollets brûlaient et je ne fixais que les siens devant moi (qui devaient brûler tout autant) pour avancer un pas à la fois.

Quelle surprise de rencontrer un camarade du secondaire en train de prendre des photos, allongé sur le sol du Mont-Grand-Fond ! Jérémie Leblond-Fontaine, un super photographe. Allez voir ses images de la nature plus que resplendissantes ! [ https://www.jeremielf.com ]

Très brève jasette, un brin de motivation additionnel, quelques centaines de mètres et nous finissons par arriver au sommet. Un grand soulagement m’habite. Je me dis: « Allez Kim! Descends ces derniers km et tu l’as ton ultra en poche ! » Oups! Les émotions montent si rapidement. C’est fou! Quasi incontrôlable. Je dois me parler pour me calmer.  J’suis pas trop pire, le focus revient assez vite heureusement.

Les derniers km passent si vite, j’ai encore des jambes pour courir telle une gazelle. Wow! Je m’épate! Mon ami Stéphan est tout aussi euphorique car on achève.

À 3 km de la fin, nous sortons du dernier single track et arrivons dans un sentier de VTT. Notre ami Carl, qui se promène en mountainbike, est si content de nous voir. Et moi donc! J’attrape une énorme dose de motivation et je cours tout ce qui se descend et tout ce qui se monte. Je sais qu’il trippe à nous voir s’amuser dans les sentiers et ça me motive encore plus.

La fébrilité est dans l’air. J’ai encore tant de jambes et c’est déjà fini dans à peine 1 km.  Je n’arrive pas à y croire. J’entends la foule au loin. Je viens les yeux pleins d’eau… les émotions ressurgissent quand je vois l’arche d’arrivée au loin. Là c’est la bonne! Je suis si émue et si heureuse de me voir réussir cet exploit.

Photo: Julie Gaudreault

Me voilà traverser le fil d’arrivée. Je fonds en larmes, en sanglots de joie et enlace mon ami avec qui j’ai réalisé cette si belle expérience. Mes amis du club VO2 sont avec moi à l’arrivée. Tout aussi émus. Je les remercie tant d’avoir été présents.

Photo: UTHC

Ce sentiment d’accomplissement personnel si grand est tout aussi difficile à décrire encore aujourd’hui …

Mon 1er ultratrail en quelques lignes : une gestion parfaite de la nourriture, de l’énergie physique et de la force mentale du début jusqu’à la fin, pas de blessure ni de douleur physique, une expérience sauvage plus que magnifique, une persévérance croissante, une gloire personnelle et une amitié durable plus qu’admirable. Je repars chez moi émerveillée de ce que j’ai accompli.  Et en prime, une belle médaille de bronze au cou.

Est-ce que je vivrai une aussi belle expérience personnelle à mon prochain ultra ? Aurai-je des hauts et des bas à surmonter? Une chose est sûre : c’ est que je plane toujours sur ce beau et grand nuage, d’ici ce temps à venir.

[ L’ironie de cette histoire est que j’ai réalisé le même temps à la seconde près de celle qui m’a inspirée pour ce 80 km.  Au plaisir de te rencontrer dans de futures courses en sentier.