J’ai traversé Charlevoix en même temps que j’ai traversé ma vie.
J’aime courir en trail. J’aime sentir les odeurs différentes selon la profondeur, la saison, le temps. J’aime la sensation des endorphines après la course. J’ai besoin de courir.
Mais le 125 km Harricana, ce fut autre chose.
J’ai couru, j’ai trouvé ça difficile, j’ai continué. J’ai pensé à mes garçons. J’ai voulu qu’ils soient fiers de leur mère. J’ai espéré mon amour de jeunesse, qui vieillit à mes côtés depuis plus de 20 ans, au prochain ravito.
J’ai couru, j’ai trouvé ça difficile, j’ai continué. J’ai pensé à tous les encouragements et je me suis sentie aimée. J’ai repensé à mes garçons et j’ai espéré être une bonne mère.
J’ai couru, j’ai trouvé ça un peu plus facile, car un bénévole a rempli mes gourdes avec tout l’empathie du monde. J’ai continué. Je me suis demandée pourquoi je faisais ça et si j’aimais les gens à la hauteur de ce qu’ils méritent.
J’ai couru, j’ai trouvé ça difficile, j’ai continué. J’ai pensé aux amitiés perdues et au caractère définitif de la mort. Je me suis demandée si la boule noire en avant de moi était un bébé ours ou un porc-épic. Vive les porc-épics!
J’ai couru, j’ai senti mon cœur dans ma poitrine et j’ai vu Charlevoix du haut d’une montagne et j’ai trouvé ça beau, et finalement, à la fin, j’y suis arrivée.
J’ai traversé Charlevoix en même temps que j’ai traversé ma vie en étant certaine de ne rien vouloir y changer.