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Cauchemar évité

Le moins qu’on puisse dire d’entrée de jeu, c’est que mon désir de compléter mon UTHC 42 a failli tourner au cauchemar.

Remontons dans le temps si vous le voulez bien mais pas trop longtemps. Novembre 2015. Mon mode de vie désordonné m’amène bientôt au seuil des problèmes de santé. À 35 ans, surpoids, haute pression, problème de diabète en vu, il est temps de changer drastiquement.

Six mois plus tard, la transformation est complétée. Je commence a courir et surprise! j’aime bien ça. Mais ce que je découvre en trail est encore plus incroyable.

Septembre 2017. Mon premier UTHC, un 28 km, je suis tout énervé mais surtout apeuré devant une distance que je n’ai jamais faite. L’épreuve se termine bien dans les circonstances. Une seule déception: pas de 42 km l’année suivante. Je me sens invincible déjà.

Septembre 2018. Deuxième UTHC 28. Beaucoup mieux que le premier. Tellement que je suis le premier à m’inscrire pour le 42 en 2019. Enfin ! Je pourrai le faire.

Le premier chapitre du cauchemar commença  neuf mois avant la course, fin décembre 2018. Une fracture de la jambe et opération de la cheville (fracture de maisonneuve pour ceux qui aime les détails) Le chirurgien m’annonce un six à neuf mois de récupération… peut-être plus. Découragement.

C’est un coup dur mais je refuse d’abandonner. Je travaille très dur et je refuse de vendre mon dossard si bien que le 7 septembre au matin dernier, je suis sur la ligne de départ du 42 km. Ça y est! On y est! Enfin! J’ai travaillé si fort, enduré tellement de douleurs.

La course commence. Je prends un rythme respectant ma condition (j’ai encore des douleurs à la cheville des suites de l’opération). Le terrain est technique surtout pour une cheville de ‘bois’ mais les premiers kilomètres passent relativement rapidement.

Le premier ravito est à 21 km. Je suis convaincu que j’aurai l’énergie nécessaire pour m’y rendre sans difficulté. Je néglige donc la partie alimentation. Grosse erreur. Le cauchemar recommence. Pris de nausées au 18 km, je mets pour la première fois le genou au sol. Je prends mon cellulaire dans ma poche. J’écris à ma conjointe que je ne réussirai pas… les maux de coeur sont trop fort.

Je me relève pour reposer une deuxième fois le genou au sol au 19 km pendant plusieurs minutes. Plusieurs coureurs y vont d’encouragements. « Le ravito n’est pas loin courage ! » Au sol, en panique, je visualise ma défaite… je me vois revenir au départ avec l’équipe de sécurité. Je me vois au camping en pleurs d’avoir échoué dans ce que plusieurs me disaient d’abandonner. Je sers alors les dents et les poings… pas maintenant !!! Allons au ravito.

Au ravito de l’épervier, je m’assois. J’ai froid, j’ai mal au coeur, je sirote ma soupe et mon pepsi dans l’espoir de reprendre mes forces. Je vois alors la liste d’abandons. Un responsable entre chaque minute un nouveau dossard qui abandonne. « Non! ça ne sera pas moi… pas ici… Split BMR c’est 6-7 km… on y va, même en marchant » Je repars donc… manteau, gants, tuque, alors que certains courent en t-shirt et short.

Une série de rencontres lors de ces km entre les ravitos vient cependant me redonner espoir. Je fais la connaissance d’une autre participante avec qui je pourrai faire de nombreux km mais surtout oublier mon mal. Je croise le chemin d’un bon ami qui m’encourage à ne pas abandonner. Je recommence même à courir à la suite de sa rencontre.

Rendu au split, il n’est pas question d’abandonner. J’ai froid, j’ai encore des maux de coeur… mais la montagne noire… je la connais. Aucune surprise donc! Je continue  avec ma partenaire pour la montée… je recommence à courir vers la station montagne noire… ça y est… dernier 7 km.

Rempli d’un nouvel espoir de réussite, je distance pour la dernière fois en course celle qui a été placée sur mon chemin au bon moment par le destin. Chaque km j’envoie un message à ma conjointe : 4… j’arrive… 3,2,1…

J’arrive au fil d’arrivée, l’émotion m’envahit… ma cheville me rappelle que je l’ai poussée, mon corps se met à grelotter… je flanche… je pleure ma vie dans les bras de celle qui m’a attendu au froid pendant des heures… je pleure de n’avoir pas abandonné. Ce n’est pas ma plus belle course… mais celle-ci m’a prouvé comment la détermination peut venir à bout de bien des choses. Le cauchemar… finalement m’avait réservé une finale hollywoodienne.

On apprend de nos erreurs dans chaque course… je reviendrai plus fort encore. Je suis loup.

Durée Distance Dénivelé
km m
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