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DNF – Découvrir Notre Force

UTHC 125, septembre 2020

C’était il y a une semaine….

Prête comme jamais, je prends le départ en pleine nuit pour cette épopée épique, au sommet de ma forme, le mental dans le plafond! 31 000 mètres de d+ et 1800 km dans les jambes depuis la fin février: 2020, c’est mon année! 

J’ai tout prévu, tout calculé, tout testé, je suis en contrôle de ma course, de mon alimentation, de mon hydratation, jusqu’à ce que le vent tourne, sournoisement, sans avertir, et emporte avec lui toute une année d’efforts et d’espoirs….

Qu’est-ce qui s’est passé? Je ne sais pas…

Après un départ facile et roulant, on passe assez vite aux choses sérieuses! Les sentiers sont techniques, boueux, je comprends rapidement que le défi sera de taille, mais je suis là pour ça! Je prends même une pause au sommet des Morios, en pleine possession de ma course, pour quelques photos avant de redescendre et rejoindre le ravito suivant. 

J’ai 5h devant moi pour parcourir les 25 km suivants; je suis solide en montée, donc l’ascension vers la Noyée ne me fait pas peur, et les 10 derniers km seront roulants, bref, je repars à mon rythme, un km à la fois, fidèle au plan… jusqu’à ce qu’une douleur de plus en plus intense au bas du dos et un dysfonctionnement rénal, après moins de 35 km, me rentrent dedans sans préavis…. quoi???? 

Déstabilisée, je décide rapidement de poursuivre en me disant que ça finira par passer, en mettant un pied devant l’autre, laissant tranquillement la place à un doute grandissant…. 

Je lève les yeux et j’aperçois Themy, dont j’ai fait la connaissance quelques heures plus tôt en attendant la navette de minuit quinze qui nous a transportés jusqu’à la ligne de départ. Il semble mal en point, lui aussi… il souffrait de crampes lorsque je l’ai dépassé dans la montée des Morios, mais il m’a vite distancée dans la descente!  Il est reparti du dernier ravito avant moi, mais voilà que nos routes se croisent encore une fois, pour le début d’un combat dans lequel nous déciderons finalement de travailler en équipe, en espérant passer à la mi-course avec une petite marge de manoeuvre qui nous permettrait de prendre une pause et, espérons-le, de régler nos ennuis de santé! 

Au début, on discute, on parcourt quelques sections avec d’autres coureurs, on avance!…mais au fil des km, on ralentit, on peine à trouver un rythme…. pendant de longs moments, on court, on marche, dans un silence de plus en plus intense, mais qui parle beaucoup, orientés vers notre objectif commun… je tiens le coup, je continue d’y croire, car je me dis qu’en équipe avec Themy, la victoire demeure possible, et que nous y arriverons, un km à la fois! 

Au ravito de la Chouette, à 10 km de la mi-course et du fatidique cut-off, nous repartons avec l’intention d’augmenter le rythme, mais je n’y arrive plus…. courir me donne des spasmes dans le bas du dos, et je comprends finalement qu’à ce rythme, je n’y arriverai pas…. ma course est terminée.

Je pousse Themy à tenter le tout pour le tout sans moi, en souhaitant qu’il puisse passer à la prochaine étape, et en lui faisant promettre de consulter un bénévole à la tente médicale des Hautes-Gorges avant de repartir car il n’arrive plus à s’hydrater depuis un bon moment.

Pendant les quelques heures de marche qui ont suivi, j’ai essayé de comprendre…

Après 10h de course, j’y aurais cru, au problème de reins, mais là, j’y comprends rien! J’ai donc pensé à une infection, qui serait apparue dans le pire timing de merde de l’histoire, soit en plein pendant la réalisation mon objectif ultime de 2020….

C’est finalement en compagnie de Themy, que je retrouve à 2 km de la fin et lui aussi contraint à la marche, que je termine mon aventure, après 63 km parcourus. Les bénévoles nous attendent avec le grilled cheese le plus réconfortant de l’histoire! 

Depuis mon retour à la maison, évaluation médicale, tests et analyses, je suis encore en attente de résultats… les symptômes, encore présents, s’atténuent de plus en plus…. ce qui me porte à croire que je ne saurai jamais avec certitude ce qui s’est passé….

Voilà… 

Je dois maintenant reconstruire ma confiance, faire taire le doute, accepter…. heureusement, je sais très bien qu’au fil des jours, ma passion pour la course reprendra le dessus, et que les plans de fou recommenceront à se bousculer dans ma tête d’extraterrestre ! 

D’ici là, je me donne du temps….

Au fil des ans, la course en sentier m’a donné tellement plus qu’elle ne m’a pris! Encore cette fois, avec le recul, je remercierai la vie pour cette expérience incroyable qui m’a permis de vivre des moments plus grands que nature avec des êtres d’exception! Je transformerai cet échec en victoire en acceptant que l’atteinte de mon objectif n’était tout simplement pas possible ce jour-là ! 

Je recommencerai à rêver de la ligne d’arrivée, des émotions que j’y vivrai, jusqu’à ma prochaine opportunité! Je me dirai que tant d’autres avant moi ont persévéré et vaincu, plus résilients et plus forts! 

Je me réconforterai en me disant que la prochaine fois sera la bonne…

Alors, à l’année prochaine?