La vie est drôlement faite parfois. Si la pandémie avait eu lieu deux ans auparavant, ma vie n’aurait pas été affectée outre mesure. En patate de divan que j’étais, j’aurais continué ma fainéantise légendaire tout simplement. Comme je travaille toujours et que ma conjointe s’occupe de l’épicerie, j’ai d’autres qualités…, mon parcours aurait été sensiblement le même.
Mais voilà! la folie de la course s’est emparée de moi.
Ni coureur élite, ni trailer de haut niveau, je ne suis point un athlète. Je suis arrivé à la course par accident. Avant 2018, je n’en avais qu’une derrière la cravate : le défi Ladurantois, une course à obstacles de 6 km. Et la partie course m’emmerdait. Vous dire à quel point je partais de loin est un euphémisme.
Puis arriva ce jour de juin 2018.
Randonnant dans les sentiers du parc de la rivière Gentilly avec ma blonde, celle-ci me lance un naïf : « On cours-tu? ». Ayant toujours critiqué ces coureurs hurluberlus incapables de profiter des paysages, je lui réponds promptement :
« Pourquoi pas? ».
La révélation!
Avoir les sens toujours en alerte, voir les arbres défiler à vitesse grand V, en réalité, c’était relativement lent, m’enfin…. Je tenais quelque chose.
A la sortie du parc, nous voyons l’affiche du Défi du parc de la rivière Gentilly. Principalement compétition de vélo de montagne, ils avaient ajouté un volet course en sentier pour l’édition 2018. Dans un élan d’enthousiasme mal contrôlé, nous décidons de nous inscrire. Deux distances étaient proposées : 7 ou 14 km. Avec notre 45 minutes d’expérience en course en sentier, on opte naturellement pour le…14 km. Deux mois pour se préparer : que nous étions inconscients!
Je ne pratiquais aucun sport depuis des lustres. Je me tenais relativement en forme grâce à mon travail de facteur. Côtoyant quotidiennement mon amie, l’ultra-athlète Renée Hamel à mon bureau, je me suis dit que si elle pouvait performer autant, tout en pratiquant le même métier que moi, je me devais de m’y essayer.
J’avais volontairement omis le fait qu’elle courait depuis des années , et que moi, je débutais à …49 ans.
Vous vous en doutez, cette course fut une catastrophe. Pour la première édition de la course, il n’y avait que 9 participants au 14 km, dont quatre hommes et cinq femmes. J’ai terminé en… roulement de tambour… 9e position! Malgré tout, j’étais aux anges. Je venais de compléter ma première course de trail officielle. Et puis, c’est le plus proche que je ne serais jamais d’un podium. Quatrième chez les hommes, même si c’est par défaut, ça se glisse bien dans une discussion.
Aujourd’hui, un an et demi plus tard, mon parcours est un peu plus rempli :
- 10 km à Pont-Rouge
- Grand demi-marathon de l’Isle-aux-Coudres, 23 km.
- 14 km défi du parc de la rivière Gentilly 2019, ou j’ai retranché ½ heure à mon temps de 2018.
- 24 km Trail du Grand-Duc
Et surtout, aucune dernière position.
Pour 2020, j’avais prévu faire une course par mois, allant de 18 km à 35 km, si l’entrainement se passait bien. Malheureusement, les annonces gouvernementales sont tombées comme un coup de massue dans les genoux. Triste constat : je n’ai plus de course.
Une fois le choc encaissé, c’est l’heure de se mettre au plan B. Heureusement, nous avons encore le loisir de courir à l’extérieur. Faire un marathon sur mon balcon ne fait pas partie de ma liste de défis personnels.
Bien sûr, la fébrilité entourant une course organisée ne peut être reproduite, mais la course, elle, peut l’être. Faire un demi-marathon à l’Isle-aux-Coudres, à Lévis ou dans les rues de Beauport, ça reste un demi-marathon. Et en plus, nous n’avons pas à faire la file pour aller aux toilettes.
Officiellement, c’est-à-dire sur Strava, j’ai commencé à courir le 20 avril 2019. Dans une semaine, cela fera un an. Pour l’occasion, j’espère accumuler les 1000 km. J’en suis à 950, alors je crois le tout réalisable. Une moyenne de 2,74 km chaque jour depuis un an, ce n’est pas énorme mais pour un quinquagénaire inactif il y a un an, je trouve que c’est une belle réussite. Surtout que cet hiver, j’ai couru deux ou trois fois, maximum par mois.
En ces temps de confinement et d’éloignement social, à chacun maintenant de trouver un défi à sa hauteur. Pour certains, un 5 km représente tout un défi alors que pour d’autres, c’est de faire cinq aller-retour dans une montagne de 1000 mètres dans la même journée. L’important, c’est de connaitre ses limites … pour pouvoir les dépasser. Mes limites, aujourd’hui, ne sont pas les mêmes qu’il y a un an, et j’espère les repousser assez pour un jour réaliser mon rêve : faire un ultra.
Pour terminer, si j’arrête de comparer mon pace avec celui de Jean-François Cauchon sur Strava, ça va bien aller.