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Lavaredo 2019, ou le récit de nos courses à l’italienne

Récit de courses collaboratif par Simon Rivest et Laurence Baril.

Petit préambule : nous sommes deux coureurs de trail passionnés. Notre parcours ressemble à celui de plusieurs au Québec depuis l’essor de la course en sentiers : premier coup de coeur à l’UTHC, puis une course, et une autre, on fait le tour du Québec, de ses montagnes, forêts, lacs, etc. À chaque fois, c’est une partie de plaisir renouvelée. Avec les années, Simon allonge les distances alors que Laurence tente d’aller de plus en plus vite.

C’est après la saison 2018 (et le visionnement de toutes les vidéos récapitulatives de l’Ultra Trail World Tour) que nous avons décidé de nous exporter le temps d’une course. Le choix s’est vite porté sur cet évènement grandiose qu’est le Lavaredo Ultratrail. En voici notre récit.

Arrivés le mercredi 26 juin à Cortina d’Ampezzo. Magnifique petit village de ski, juché entre les Dolomites, immenses. Les cols à traverser pour y arriver donnent une idée de ce qu’on devra courir, c’est impressionnant! La ville est encore tranquille, comme à l’aube de quelque chose de gros, très gros.

Jeudi 27 juin, 1er jour de course : il fait chaud. Nous sommes en plein dans la canicule qui a frappé l’Europe en début d’été. On ramasse les dossards, la fébrilité est dans l’air. Coureurs de toutes les nationalités, tous les âges, tous les styles se côtoient dans le village qui est devenu monde de course le temps de quelques jours. C’est excitant de côtoyer Tim Tollefson, Caroline Chaverot et toutes ces gazelles internationales qu’on admire.

Départ de la Skyrace à 17 h 00 (une Skyrace, par définition en une course plutôt courte, environ 20 km, avec beaucoup de D+, au moins 1000-1300 m)

Laurence, time to shine ! Ça grimpe fort pour commencer : on se retrouve vite à flanc de montagne, le précipice n’est jamais loin (au sens propre, et non figuré.) C’est avec surprise qu’on annonce au point le plus haut de la course que je suis en 3e position chez les femmes… Vive le power walking et les escaliers du Cap Blanc. C’est beau, c’est vertigineux, et ça roule. Il faut se parler un peu pour se concentrer sur les roches qui roulent sous les pieds et ne pas ralentir. La contemplation viendra après la course, un « aperitivo » à la main. S’en suit une éternelle descente (lire ici 1000 m), où je fais de mon mieux pour garder la vitesse et regarder le paysage en même temps. Comme quoi tout ce qui monte redescend, et certains plus vite que d’autres..! L’arrivée se fait dans le village, où tous, je dis bien tous, encouragent les coureurs en champions du monde.

Verdict final : 20 km, 1100 m D+, 2:18, 6e femme, 25e overall, et un énorme sourire à l’arrivée. 

Vendredi 28 juin, jour d’Ultra : il fait encore chaud. Le départ de l’Ultra de Simon étant à 23 h, la journée parsemée de petites siestes et de séances de hamacs, histoire de faire le plein de sommeil avant la course tant attendue. Partout en ville, on sent de l’électricité dans l’air. On entend parler en italien, espagnol, anglais, polonais, mandarin, etc. Pas besoin de comprendre la langue pour déceler la fébrilité dans les voix, mélange de stress et d’excitation. Arrivés sur la place du départ à 22 h, avec les 1799 autres coureurs (un total de 1800 coureurs ont pris le départ), les lumières et l’ambiance survoltée d’un début de course. Il y a du monde c’est incroyable. Du jamais vu, une telle atmosphère !

Le départ est lancé, en thématique bain de foule (lire : pire qu’un mushpit de concert de rock, selon Simon). Dans les premiers km, ça se dégage, mais c’est un retour à la file indienne obligée dans le début des montées. S’en suit une longue, mais bonne nuit, de « monte-descend » pour Simon, qui se termine avec le lever du soleil au point le plus haut de la course (2400 m.) La lumière orangée sur le Tre Cime di Lavaredo valait à elle seule le prix des billets d’avion.

Par la suite, 1ère erreur : talonner un Italien dans une descente effrénée de 8 km : casse-pattes. Il faut comprendre que les « monte-descend » mentionnés plus tôt sont du D+ à l’européenne, c’est-à-dire des grimpes de 1000 m, suivies des descentes du même calibre. Comparé aux multiples bosses de plus petites envergures auxquelles le Québec nous a habitués, ça te fatigue les jambes. Mi-course : il prend un moment pour récupérer ses esprits (et ses jambes) au ravito de Cimebanche (66 km).

Puis, il repart dans la montagne, vers un passage de 20 km dans une vallée rocheuse, large et « fournaise ». Ça marche plus que ça court dans cette section, mais ça continue à avancer. Dernier obstacle : montée du Passo Giau (103 km), col superbe et passe finale en haute altitude. En haut, ça va, mais pas l’estomac (qui décide de rendre les armes). Derniers 18 km faits sur le Coca-Cola et l’eau salée, ça, ça tire un homme (au moins un peu). 10 km finaux durant lesquels il voit Cortina, qui ne semble jamais se rapprocher malgré les 1000 m de D-. Finalement c’est le finish, traversé à la course et avec fierté. Ça été dur, mais ça été.

Verdict : 121,2 km. 5770 m D+. 18:18. 118e overall. 67e catégorie.  

Bref, un événement formidable. Une ambiance de feu. Des montagnes à couper le souffle, dans tous les sens du terme. Nous sommes tous les deux extrêmement heureux de cette expérience italienne. Il y a quelque chose de complètement excitant dans le fait de courir dans un environnement inconnu, surtout lorsqu’il est aussi grandiose. Chaque fois que c’était dur, on a eu qu’à lever les yeux et voir le paysage pour avoir un regain d’énergie. Vraiment, c’est une expérience à répéter ; qui sait quelle sera la prochaine destination ?

Mais courir à l’étranger nous a aussi fait réaliser à quel point nous avons des courses de qualité au Québec. Bravo, organisateurs d’évènements de trail, vous n’avez rien à envier aux géants de ce monde et courses de l’Ultra Trail World Tour !