JANVIER 2020
Je reçois un étrange cadeau pour mon anniversaire : un mois de suivi avec un entraîneur privé. Auparavant, j’avais annoncé à la ronde que j’allais faire le 80 km de QMT en juillet. Une distance et un dénivelé que je n’ai jamais expérimentés. Jusqu’ici en trail, j’ai toujours bien réussi malgré mes pauvres 2 jours /semaine d’entraînement, m’étant même retrouvée avec stupéfaction sur un podium à deux reprises!
Il y a pourtant des limites au talent naturel et j’ai pensé qu’il faudrait peut-être commencer à être «un peu plus sérieuse, tout de même», pour réussir à terminer 80 km de course… avec le sourire et sans blessure!
Une gentille personne pense donc à m’offrir cet encadrement. Je suis sceptique. Vais-je aimer ça? J’ai connu la rigueur des plans d’entraînement en athlétisme plus jeune. Depuis, je les fuis. J’ai recommencé à courir en 2018 suite à une peine d’amour et j’ai poursuivi, sans trop de calculs ni contraintes, pour le côté social et la contemplation en nature surtout.
Bon ok, peut-être aussi un tout petit peu pour le dépassement!
8 MARS 2020
Enfin, je me lance, en même temps que la COVID-19. Après tout, il faut bien que j’utilise mon cadeau!
Étonnamment, ces entraînements prévus à mon horaire se révèlent être plus qu’ appropriés et salutaires en cette période restrictive au niveau des activités et des contacts sociaux.
De par mon travail en santé, je suis aux premières loges pour observer les effets négatifs du confinement sur la santé physique et psychologique des gens. Je constate que je reste positive. Je ne ressens pas ce vide ou ce malaise que plusieurs expérimentent. J’ai chaque soir quelque chose qui m’attend, consciencieusement préparé pour moi. J’ai des comptes à rendre. Je renoue avec la course en solitaire et me permets quelques unes à deux, à distance appropriée.
Qui plus est, mes entraînements font écho à l’intensité vécue au travail. Notre milieu est en complet bouleversement. Les choses changent quotidiennement à mesure qu’évolue la situation. C’est un tourbillon. Tout va vite. Je m’adapte en conséquence. Je m’organise, priorise, décide, collabore, m’informe, soutiens et exécute. Je reste concentrée, alerte et zen.
En parallèle, sur la route, je lève les genoux, balance les bras, vide mon esprit, évacue le trop-plein, accélère ma respiration, expérimente différents rythmes. Je fais face au vent, au travail comme en courant. Le virus progresse, moi aussi.
À bien y penser, c’était un bon moment pour commencer à «m’entraîner plus sérieusement». À la fin de ce confinement, si la course nous est toujours permise, mes cheveux seront plus longs, j’aurai des jambes de fer et un moral préservé, tout en ayant retrouvé le plaisir de courir seule, tout autant que mes priorités.
10 AVRIL 2020
QMT annonce officiellement que l’évènement est annulé.
C’est définitif. Il n’y aura pas de 80 km.
Mon entraîneur me contacte.
– Toutes les courses sont annulées. Mes athlètes ont arrêté leur suivi. Nous, on fait quoi?
– Ben voyons! On continue!
* Pensée pour tous les travailleurs de la santé qui font face à la situation actuellement