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Québec Méga Trail 2018 – flirter avec le déraisonnable

Ça faisait longtemps qu’on l’attendait celle-là. Après un début de saison en dents de scie je comptais bien sur ce gros morceau pour booster ma confiance. Belle perfo à Boston ce printemps puis flop au MIM en Espagne début mai et course honnête sans plus au Trail de la Clinique Du Coureur il y a 3 semaines. Mon entraînement va bien malgré mon horaire chargé et mes petites nuits mais l’estomac est fragile et la solution aux nausées n’est toujours pas à point. 

Le parcours proposé par le Québec Méga Trail est tout simplement majestueux. Le départ au bord de l’eau avec le levé du soleil donne un bel avant-goût des paysages époustouflants qui nous envahiront le coeur sous peu.

Plan de match obligatoire: débuter doucement et y aller avec un lent crescendo selon les sensations. Objectif dans les 15 heures, c’est très possible. Je tombe dans les pattes de Michel Désy pour une vingtaine de km, ça c’est de l’or en barre. Je me garde toutefois de poursuivre à son rythme et prend l’option raisonnable. Je ne laisserai personne influencer mon pace. Les kilomètres avancent très bien et je croise bon nombre de coureurs tous plus charmants les uns que les autres. Caroline Côté, Elizabeth Cauchon, Stéphane Poulin, Blaise Dubois, Yannick Normandeau et j’en passe. Le temps est chaud et humide mais vraiment tout se passe bien. Les paysages du sentier des caps sont tout simplement bouleversants.

En arrivant au ravito #4 au 50ème km je suis tout excité de retrouver mon drop bag avec de l’eau pétillante et une gourde de Kombucha. Je m’embale un peu et englouti ma gourde d’un coup. Erreur, quelques secondes plus tard le tout va ressortir en jet… dam… Ça va me prendre un bon 15-20 minutes avant de reprendre mes sens pour repartir. J’ai donc pratiquement rien mangé à ce ravito essentiel. J’en serai sévèrement puni…

Prochaine section: le sentier de la Mestashibo. Un coup de coeur pour moi au Québec mais y’a rien de facile ici. Kilomètre 64, je croise ma douce Ju et Marilyne au ravito#5, ça va pas très bien… vraiment pas bien. C’est la fin de l’objectif performance. Je suis incapable de manger… nausées… vomissements… c’est pas chic… j’ai froid alors qu’il fait chaud… je m’installe couché au sol avec un chandail et une couverture réfléchissante. Plus de deux heures s’écouleront. Il reste plus de 35 km à parcourir dont l’ascension du Mont Saint-Anne par la crête… ouf… On me regarde vraiment croche quand je mentionne que je n’ai pas encore décidé si j’abandonne ou pas. Belle vague de surf entre l’orgueil mal placé et la persévérance. J’ai pas envie d’abandonner, pas du tout, vraiment pas du tout. Ma seule question à moi-même: est-ce que je me mets en danger? La réponse est non, ça va juste être vraiment, vraiment, vraiment, vraiment tough… Go! On efface toutes les pensées négatives, on se lève, on prend ce qui reste de jambe, de coeur et de tête et on fera avec.

Le Québec Méga Trail se transforme alors en course de marche rapide. Je réussi à tenir 6km/h soutenu jusqu’au pied du Mont Saint-Anne où je prendrai une bonne pause pour requestionner à nouveau mon état avec mon ami Louis-Étienne qui m’accompagnera sur les 25 derniers km. Nous avons eu droit a un couché de soleil d’une grande beauté au sommet du Mont Sainte-Anne. Il y a des moments de poésie créés par la rencontre de la souffrance et de la beauté qui se décrivent mal en mots. Nous croiserons également un petit renardeau curieux, une lune apaisante, une nature d’une grande beauté.

Merci à Marc-André Boivin, Jean Fortier et tous les bénévoles. Vous êtes des marchands de bonheur. Merci à Louis-Étienne pour ton support, j’aurais pas pu continuer seul. Merci à tout ceux qui doutaient de mon état d’avoir fait confiance en mon jugement. Un jour je serai capable de manger comme Sébastien Côté! Ma douce Ju, je sais que t’aime pas ça quand je fais dur… je t’aime! Ça pas été facile mais j’ai appris beaucoup et je ressors la tête haute de cette aventure humaine. Je repasse en mode solution pour trouver la clef à ma fragilité gastrique. J’ai pas dit mon dernier mots, j’ai déjà plusieurs pistes à exploiter… tête de cochon…

Durée Distance Dénivelé
km m
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